Marius Plamondon

Votre capsule historique hebdomadaire : Marius Plamondon !

Faire l’histoire de l’art québécois consiste souvent à regarder des arts graphiques comme la peinture et la sculpture. Quelques fois, nous allons nous aventurer à regarder les œuvres d’artistes orfèvres qui ont marqué notre histoire. Très souvent, même, nous nous attarderons aux œuvres religieuses. Pourtant, un des arts qui était le plus présent dans la vie des Québécois était celui du vitrail. On oublie souvent qu’au Québec, nous avons eu quelques célèbres ateliers, mais aussi des maîtres verriers importants. De ceux-ci, une des figures marquantes du Québec dans cet art est Marius Plamondon. Une plaque « Ici vécut » est apposée au 1871, rue Sheppard, pour indiquer que ce fut la résidence (et atelier) de cette figure marquante de Sillery.

Marius Plamondon serait né à Sillery en 1914, avant d’immigrer très jeune aux États-Unis avec sa famille. C’est là que se fera la plus grande partie de sa jeunesse puisqu’il ne reviendra à Québec qu’en 1932. Son retour au Québec coïncide avec son inscription à la toute jeune École des Beaux-arts de Québec sur la rue Saint-Joachim. Après 5 ans d’études, il reçoit une importante bourse qui lui permettra de parfaire son art en France (le vitrail) et en Italie (la sculpture). Ces périodes d’études seront marquantes dans l’évolution de sa pensée artistique puisqu’il travaille avec des maîtres comme Henri Charlier avec qui il apprend un certain classicisme religieux expurgé de ses influences sulpiciennes, et avec le sculpteur français d’origine polonaise, Jean Lambert-Rucki qui l’initiera aux distorsions expressives caractéristiques de l’art africain. En Italie, il étudie la sculpture sur marbre à l’Académie royale de Carrare, et la sculpture sur bois à l’Académie royale d’Ortisei.

Marius Plamondon et sa modèle et épouse, Muriel Hall
http://www.operadequebec.qc.ca/francais/mesure/hall.htm

De retour à Québec, en 1937, il obtient le poste d’enseignant en sculpture sur bois à l’École des Beaux-Arts de Québec. Cette carrière d’enseignant se poursuivra 9 ans plus tard avec l’implantation du cours de vitrail. Tout en continuant une importante carrière artistique, il mènera en parallèle sa carrière de professeur. Celle-ci se continuera, de 1963 à 1970 comme 6e et dernier directeur de cette institution. Les dernières années de directeur l’amènent à la fusion de l’institution avec l’École des Arts visuels de l’Université Laval. Il meurt à Sillery en 1976. Du côté familial, il avait épousé, en août 1944, une célèbre cantatrice contralto québécoise, Muriel Hall. Celle-ci a continué pendant de nombreuses années sa carrière, multipliant concerts et passages à la radio.

L’arbre de vie, église Saint-Charles-Garnier

L’œuvre de Marius Plamondon est principalement constituée de grandes verrières pour les plus importantes institutions religieuses québécoises, mais aussi à l’extérieur du Québec. De ses années à côtoyer Charlier à Paris, on retient l’importance des symboles et des couleurs dans des vitraux de verre plat colorés. Ses verrières sont caractérisées par un matériau de qualité qu’il allait chercher, tous les étés en Europe. Ainsi, il se démarque des principaux ateliers européens à la mode au Québec qui utilisaient des dalles de verre éclatées. De son travail avec Lambert-Rucki, il faut retenir les formes libres et stylisées qui caractérisent aussi ses œuvres. Il ne cherche pas le réalisme dans son art, mais plutôt une liberté qui s’exprime aussi par des couleurs vives et symboliques.

Verrières et sculptures sont très présentes, mais aussi discrètes dans la région de Québec. Si c’est la région où il vit, c’est ailleurs que les plus importantes œuvres de Plamondon peuvent être vues. C’est au noviciat des Clercs de Saint-Viateur à Joliette que l’on retrouve la plus grande quantité et diversité de ses œuvres puisqu’en 1940, il y installe une vingtaine de verrières ainsi que des statues. S’enchaînent ensuite une série de contrats de décoration d’édifices religieux allant de niches pour la chapelle Notre-Dame de Lourdes du Lac-Bouchette (1951-1952), des vitraux à l’église du Très-Saint-Sacrement de Québec (1954). Toujours en 1954, il conçoit les deux petits vitraux du baptistère de l’église Saint-Charles-Garnier. Après un voyage d’études en Europe (1955-1956), il obtient un contrat de 10 verrières pour les allées de l’oratoire Saint-Joseph de Montréal. Leur création et leur installation s’échelonneront de 1958 à 1978. C’est donc dire qu’il aura fallu 2 ans après sa mort pour que le projet soit terminé. Toujours à l’oratoire, mais cette fois-ci pour le cimetière, il conçoit quatorze vitraux, demi-cercles et rosace sur le thème des vertus et qualités de saint Joseph.

Lors du deuxième congrès de la langue française de 1937 à Québec, le comité organisateur fait appel à Marius Plamondon afin de créer la médaille commémorative du congrès. À l’avers, on y voit deux personnages : un représentant la France portant au front une fleur de lys, l’autre le Canada français portant au front des feuilles d’érable et portant à la main le livre des traditions ornementé de la fleur de lys. Au revers se trouve l’inscription « Deuxième congrès de la langue française au Canada — Québec 1937». La médaille est frappée en or, argent et bronze. Si la médaille d’or est remise à Louis Bertrand de l’Académie française, celle de bronze fut frappée à plusieurs exemplaires et donnée aux membres du congrès pour la porter au veston ou avec une anse, en sautoir. Fait intéressant, l’avers de la médaille fut repris en France afin de créer la médaille de l’Ordre de la fidélité française créé par le Comité permanent de la survivance française. En plus des projets et contrats religieux, il conçoit des verrières pour des entreprises privées telles que l’hôtel Queen Elizabeth de Montréal où il est possible d’admirer sa magnifique verrière.

Le siège de Québec (1690), Oratoire Saint-Joseph
https://osjusa.org/st-joseph/art/artists/marius-plamondon/

L’œuvre de Plamondon, quoique très variée, possède des caractéristiques qui permettent aux visiteurs d’être absorbés dans une atmosphère de contemplation et de mysticisme. En utilisant des formes modernes, il reprend l’esprit des maîtres verriers européens : une facture moderne, le respect des besoins liturgiques, mais aussi des matériaux. Dans l’œuvre de Plamondon, on se trouve aux antipodes des courants nord-américains de l’époque qui cherchent à faire des vitraux-tableaux ou qui font une sorte de pastiche des vitraux médiévaux. L’utilisation des couleurs et des formes démontre aussi l’apport de son apprentissage avec Lambert-Rucki. Son modernisme et sa technique le font apparaître comme un artiste majeur dans l’art du vitrail au Québec. Il se démarque aussi des grands courants traditionnels de cet art, ce qui pourrait probablement expliquer, avec le peu de traces laissées, qu’il soit moins connu que certains de ses contemporains comme l’artiste montréalais d’origine italienne, Nino Nincheri. Il reste que comme professeur de sculpture sur bois et de vitrail à l’Académie des Beaux-arts de Québec, il a certainement influencé d’autres artistes comme les maîtres verriers Olivier Ferland et Nicole Tremblay, les sculpteurs tels Raoul Hunter, Maximilien Boucher. Témoin important de la révolution des arts au Québec, il fut un collègue et ami d’artistes comme Jean Paul Lemieux et Antoine Dumas.

 

 

Pour mieux vous représenter l’œuvre de Plamondon, nous vous suggérons de suivre, à travers la ville de Québec, un parcours patrimonial débutant à sa maison sur l’avenue Sheppard à Québec (Sillery).

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Brève bibliographie

« Marius Plamondon ». dans Wikipédia, 19 octobre 2021, https://fr.wikipedia.org/wiki/Marius_Plamondon

ATELIER RODRIGUE. « Marius Plamondon (1914-1976) », Un vitrail dans chaque maison, https://atelier-rodrigue.ca/patrimoine-histoire/plamondon.html.

CORRIVEAU, Claude. Le patrimoine religieux de l’église Saint-Charles-Garnier, Québec, Fabrique Saint-Charles-Garnier, 2012

LAROCHE, Ginette. « L’art du vitrail au Québec », Le vitrail, No 46 (hiver 1990), https://id.erudit.org/iderudit/18047ac

OBLATES ST-JOSEPH. Marius Plamondon, 2020, https://osjusa.org/st-joseph/art/artists/marius-plamondon/

RACINE, Denis. « Le deuxième congrès de la langue française en 1937 », Cap-aux-Diamants, Vol, 122

VILLE DE QUÉBEC. « Marius Plamondon », Répertoire du patrimoine bâti, https://www.ville.quebec.qc.ca/citoyens/patrimoine/bati/thesaurus.aspx?id=13058&type=4