Les monuments de Sillery : la statue de saint Michel
Votre capsule historique hebdomadaire : la statue de saint Michel !
Avec cette capsule, nous amorçons une nouvelle série portant sur les monuments de Sillery. Cela nous permettra de mettre en alternance différents thèmes liés directement ou indirectement à l’histoire de Sillery. Cette semaine, nous vous invitons à apprécier un monument qui fut important pour l’histoire de Sillery puisqu’il avait une grange charge historique. Malheureusement, depuis 2015, le monument n’est plus sur son socle et toute trace de son existence a disparu. Voici donc l’histoire de la statue de saint Michel terrassant le dragon, statue qui se trouvait à la lisière du terrain du monastère des sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc.
Saint Michel dans l’histoire silleroise
Saint Michel est un personnage important pour Sillery, et ce pour plusieurs raisons. Pendant les siècles de l’occupation du territoire de Sillery par les Européens et leurs descendants, saint Michel a eu une importance majeure. Au XVIIe siècle, alors que la Nouvelle-France débutait, son nom est lié à un fief, limitrophe à la seigneurie de Sillery (à l’ouest) et de la châtellenie de Coulonge (à l’est); au XXe siècle, son nom est lié à une communauté religieuse et à divers autres édifices du territoire.
C’est en 1637 que le vocable de Saint-Michel va commencer à s’implanter sur le territoire sillerois. C’est à cette date que la Compagnie des Cent-Associés va concéder au sieur Pierre de Puiseaux, âgé approximativement de 71 ans, un fief nommé Saint-Michel. Celui-ci est situé entre l’actuelle côte de Sillery (limite avec la seigneurie de Sillery) et l’avenue de L’Assomption (dans Bergerville). Pierre de Puiseaux y fera construire une maison au bas de la falaise, et probablement aussi une autre au haut de cette même falaise. C’est dans sa maison sur le bord du fleuve qu’il accueillera pendant l’hiver de 1640 les religieuses augustines qui attendent que leur hôtel-Dieu, à l’ouest de la mission des jésuites et de la pointe Saint-Joseph, soit prêt à les accueillir. C’est aussi dans cette maison, l’hiver suivant (1641-1642) qu’habiteront Paul Chaumedey de Maisonneuve et Jeanne Mance avant d’aller fonder Montréal. Il faut dire que Pierre de Puiseaux voulait participer à la mission d’évangélisation des Iroquois lancée par la Société Notre-Dame de Montréal à qui il cède ses possessions et sa fortune. Il peut donc être considéré comme le 3e co-fondateur de Montréal. Malade, il retournera en France en 1644, après que le fief Saint-Michel lui aura été remis afin de financer son voyage de retour à La Rochelle où il mourra en 1647. Le fief Saint-Michel, quant à lui, sera vendu à Charles Legardeur de Tilly, transformé en fief et seigneurie, puis au Séminaire de Québec. Les ruines de la vieille maison, principalement ses voûtes se trouvent au pied de la falaise de Sillery, sous le pavage du boulevard Champlain.
Saint-Michel, c’est aussi le nom que les jésuites donnent à la chapelle qu’ils font construire dans l’enceinte de la mission de Sillery (mission Saint-Joseph). La chapelle est érigée avec l’aide de l’importante donation faite par les héritiers de Michel de Marillac (garde des Sceaux français décédé en 1632, et qui a participé à un complot contre le cardinal de Richelieu). Commencée en 1644 et terminée en 1647, c’est dans ses fondations que fut inhumé le père Ennemond Massé, premier missionnaire mort en Nouvelle-France. Lorsque les abbés Laverdière et Ferland y effectuent des fouilles en 1869, ils y trouvent le corps du père Massé, mais aussi ce qu’il restait du cimetière autochtone où furent inhumés les autochtones morts à la mission Saint-Joseph. Après les fouilles de 1869, les ossements du père Massé furent mis dans une voûte surmontée du monument actuel.
En 1914, la communauté des Sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc est fondée au Massachusetts par le père Marie-Clément Staub et Célina Benoît. En mars 1917, la communauté achète le terrain à l’est du cimetière Mount Hermon afin d’y construire un monastère où elles emménagent en 1918. Le 29 septembre 1922, en présence de Mgr Roy, coadjuteur de l’archevêché et de nombreux dignitaires, le monument à saint Michel est inauguré à l’entrée de la propriété des Sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc. Pour le père Staub, cette statue a une double raison. Elle représente saint Michel, l’archange qui est apparu à Jeanne d’Arc pour lui donner sa mission, mais aussi elle situe la limite du fief Saint-Michel de l’époque de la Nouvelle-France. La statue de saint Michel est un bronze, œuvre de la maison Fumière de Paris. Elle représente l’archange, avec son étendard du Sacré-Cœur, terrassant le dragon (sous la forme d’un crocodile). L’inscription mentionne
Saint Michel Archange Prince de la milice Céleste Porte-étendard du Sacré Cœur Défenseur de ses œuvres Ange gardien de Jeanne d’Arc Ce monument Béni par S. E. le cardinal Bégin Arche. de Québec fut solennellement inauguré par S.G. Mgr Roy, Coadj. de Québec le 29 sept. 1922 sur cette terre appelée, dès 1637, « Fief de St-Michel ».
En fait, la statue est une réplique, en tous points, de celle qui orne un des pinacles de la Basilique du Montmartre à Paris. Sur cette dernière, l’Église triomphante (saint Michel) terrasse le dragon, symbole de la République laïque. Même en terre canadienne, ce symbolisme est très fort puisqu’il rappelle l’arrivée de nombreuses congrégations religieuses qui ont fui dans les années 1890-1910 les persécutions de la République française.
Le monument aujourd’hui
En 1975, les Sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc offrent aux policiers de Québec une réplique dorée, légèrement plus petite de l’originale et qui se trouve dans une vitrine à l’entrée du poste de police du parc Victoria. Malheureusement, peu avant la vente du monastère des Sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc et du terrain (Maintenant Domaine de Sillery), la statue de Sillery a disparu. Elle ne semble pas avoir été volée puisqu’aucune plainte à ce sujet n’a été faite. Mais nul ne semble savoir où elle se trouve.
N’oublions pas que saint Michel est maintenant le nom de deux églises de Sillery. En 1969, l’église et la paroisse catholique de Saint-Colomb prennent le nom de Saint-Michel-de-Sillery. Sur l’ancien fief Saint-Michel, les anglicans font construire en 1854 l’église St Michael. De plus, une rue de Sillery a porté le nom de rue Saint-Michel (maintenant de Bergerville) et une école, secondaire pour garçon pour commencer, puis secondaire mixte (École secondaire de Sillery), et maintenant primaire porte le nom de Saint-Michel.
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