Les fleurs qui accompagnent l’histoire : l’iris et la fleur de lys

Votre capsule historique hebdomadaire : l’iris et la fleur de lys !

L’un des grands symboles du Québec est sans contredit la fleur de lys. Comme pour les rois de France, cette fleur est un symbole important qui nous a suivis tout au long de l’histoire, de la Nouvelle-France à aujourd’hui.

Plusieurs s’interrogeront sur l’intérêt, pour un peuple, d’utiliser un symbole floral qui n’est pas originaire de son territoire. Comme les premiers Européens venus s’installer en Nouvelle-France, le lys est venu s’imposer dans nos jardins. Mais quels sont les liens qui unissent le Québec à cette fleur ?

L’iris des marais (Iris pseudacorus)

En héraldique (la science des blasons), la fleur de lys n’est pas un lys, mais plutôt un iris des marais. Le symbole du lys apparaît dans les blasons français à l’époque du roi Clovis, premier roi franc. Pour certains, l’iris serait la fleur favorite de Clovis qui, lors de sa conversion au christianisme, adopte ce symbole (trois fleurs de lys) sur son bouclier, en remplacement les trois crapauds qui y étaient. Mais cela n’explique pas les raisons pour lesquelles la fleur de lys est un iris et non un lys. En fait, la légende indique que lors de la guerre des Francs de Clovis avec les Wisigoths d’Alaric, une biche qui fuyait le bruit des armées traversa la Vienne (fleuve qui passe à Limoge et à Chinon) montrant un gué où l’armée franque pouvait passer. Sur les bords du fleuve, les rhizomes des iris stabilisaient les rives et permettaient de ne pas s’enfoncer. Clovis prit ce symbole afin de rappeler l’aide qu’il eut pour sa victoire. Mais encore une fois, on ne voit pas le lien entre le lys et l’iris. En fait, l’iris serait un ancien symbole des Francs saliens (habitants la région actuelle des Flandres) où des iris poussent sur les bords de la Lys (rivière la plus importante de la région).

L’iris versicolore (Iris versicolor)

Mais c’est avec l’arrivée des Carolingiens que le lys (ou l’iris) devient un symbole des souverains français. Les successeurs de Pépin le Bref et de Charlemagne utiliseront le lys blanc (trifolié) et or pour signaler leur puissance. Mais c’est sous les Capétiens que le lys devient un symbole important de la royauté française : déjà, Hugues Capet (roi de France de 987 à 996) l’adopte comme symbole, suivi ensuite par ses premiers descendants. On retrouve cette fleur sur le sceptre et sur la couronne, représentée sur les sceaux. Mais c’est sous Louis VII (roi de 1137 à 1180) que cette fleur (maintenant appelée fleur de lys en héraldique) est représentée comme le symbole de la royauté française : les décors et représentations royales utilisent alors fortement la fleur de lys (dont l’assonance est très proche de la fleur de Loys, ou du roi Louis). Elle fait maintenant partie des armes des rois de France : d’azur semé de lys d’or. Pour la florentine Maison des Médicis, où l’iris est très abondant sur les bords de l’Arno, l’écu sera à champ d’argent (le blanc des héraldistes) semé de lys de gueule (rouges). Mais on s’égare ! Quel est le lien entre la fleur de lys des rois de France et celle du drapeau québécois ?

À sa fondation, la Nouvelle-France prend les emblèmes de la royauté française : un drapeau blanc semé de fleurs de lys d’or. En devenant colonie royale sous Louis XIV, la Nouvelle-France se dote d’un drapeau blanc avec des lys d’or, pavillon qui sera gardé jusqu’à la cession du territoire aux Britanniques en 1763. Avec le Régime britannique, tout lien avec la France disparaît et le drapeau royal français est remplacé par l’Union Flag, puis par l’Union Jack. Il faudra attendre le milieu du XIXe siècle pour que l’idée d’un drapeau spécifique à notre territoire refasse surface. Chez les Récollets, on retrouve le drapeau de Carillon, celui qu’avait Montcalm lors de la bataille du fort Carillon (maintenant dans l’État de New York) en 1758. Sur ce drapeau, se trouvent, au centre, les armoiries du Royaume de France (un écu d’azur portant couronne et semé de trois fleurs de lys d’or). Sur chacun des coins se trouvent, en diagonale, des fleurs de lys blanches. Les esprits s’échauffent et on recommence à rêver à un drapeau. En 1902, l’abbé Filiatrault de Saint-Hyacinthe crée le Carillon moderne, soit un drapeau bleu comportant une croix blanche et ayant aux coins des fleurs de lys. Une variante plus religieuse met au centre de la croix un Sacré-Cœur.

La bannière de Carillon

C’est en 1947 que le député René Chaloult propose à l’Assemblée législative du Québec que la province se dote d’un drapeau. Mais c’est à Maurice Duplessis, premier-ministre (Union nationale) du Québec que la paternité du fleurdelysé québécois est donnée. Avant même que la motion de René Chaloult soit votée, un décret ministériel crée le fleurdelysé. Le 21 janvier 1948, l’Assemblée législative adopte le nouveau drapeau du Québec qui doit flotter sur le mât du parlement de Québec. Mais celui qui est choisi pour cette journée est le Carillon moderne. Il faudra attendre le 2 février avant que le vrai drapeau du Québec soit hissé sur le mat. Le drapeau se décrit ainsi : « d’azur à la croix d’argent cantonnée de quatre fleurs de lys du même ». En langage courant, nous dirions de bleu (royal) avec une croix blanche ornée aux quatre coins de fleurs de lys blanches positionnées verticalement. Au Québec, l’iris des marais, typiquement européen, est remplacé par l’iris versicolore.

Le drapeau du Québec aujourd’hui

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